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Le sens de la Création

Depuis quelques temps maintenant nous parcourons ensemble, parmi les dons de la Création, quelques beautés merveilleuses que Dieu nous a données. Nous admirons le monde qui nous entoure et nous nous apercevons qu’il ne peut pas être dépourvu d’un sens profond, les 153 gros poissons de la semaine dernière nous l’avaient déjà prouvé.
Dieu a créé l’homme à son image, lui a donné une intelligence à l’image de la Sienne, donc capable de comprendre et de donner du sens à ses actes, à ses paroles.
La Création n’aurait aucun sens ? Les objets, les animaux, les végétaux seraient réduits à leur seule utilité ?

Relisons l’Écriture Sainte, notre phare, la lumière sur notre route vers Dieu.
Gn 1, 14 à 19
Et Dieu dit : « Qu’il y ait des luminaires au firmament du ciel, pour séparer le jour de la nuit ; qu’ils servent de signes, pour marquer les fêtes, les jours et les années ; et qu’ils soient, au firmament du ciel, des luminaires pour éclairer la terre. » Et ce fut ainsi. Dieu fit les deux grands luminaires : le plus grand pour commander au jour, le plus petit pour commander à la nuit ; il fit aussi les étoiles. Dieu les plaça au firmament du ciel pour éclairer la terre, pour commander au jour et à la nuit, pour séparer la lumière des ténèbres. Et Dieu vit que cela était bon. Il y eut un soir, il y eut un matin : quatrième jour.

Les luminaires servent donc de signes. Cela n’est-il pas la définition du symbolisme ? Un objet qui sert de signe désigne quelque chose d’autre que lui-même, il en est le symbole. Les luminaires éclairent la terre et tout ce qui s’y trouve, et donc tout objet éclairé ainsi devient signe lui aussi de quelque chose. 

Par analogie, les objets sensibles de la création nous montrent, désignent, sont les symboles de réalités qu’on ne pourra pas sentir ni toucher, mais que nous pourrons comprendre, intelliger. Quoi par exemple ? Et bien la Vérité, le Sacrifice, l’Enseignement, la Sagesse et tant encore.
La Bible est un livre d’image, on y trouve des serpents, des colombes, des poissons, des chevaux, des bâtons, des barques, des épées… Et quand nous y rencontrons ces objets sensibles, mis en scène dans des images bigarrées (d’après Saint Denys l’aréopagite), ces objets nous désignent les réalités telles que citées plus haut. 
Cette relation de correspondance, entre les objets sensibles et le monde intelligible s’appelle la Fonction Symbolique des Objets. C’est une fonction humaine, au même titre que la fonction respiratoire ou digestive, mais un peu plus oubliée et que nous pouvons remettre en route.
Cette fonction nous rend capable de faire le lien entre la terre et le ciel, entre ce monde-ci et le monde venant. Sans le dire, nous l’avons mise en œuvre dans nos études précédentes, sur le lion, l’aigle, le taureau et tous nos autres articles.
Nous parlerons bientôt de l’arbre, et nous verrons qu’il n’est pas sans rapport avec notre sujet, mais aussi nous étudierons des arbres bien spécifiques présents dans Bible, pour lever un peu du voile de l’Écriture.

Les Poissons

Nous entendrons ce dimanche le récit de la pêche miraculeuse et la primauté de Pierre, Jésus le bon pasteur, confie à Pierre la mission d’être le berger de ses brebis. Y a-t-il donc un lien entre ces événements ?

Les poissons sont par définition innombrables et cachés. Il faut une action de capture, l’acte de pêcher, pour les mettre à jour. Et quand on remonte si difficilement un filet plein à craquer de poissons c’est qu’il y en a bien plus que 153.

Jésus choisit des pêcheurs comme apôtres parce qu’il fallait des hommes capables de trouver le sens et de le distribuer à la foule, et du sens, dans la Création, il y en a en abondance. Il revient à l’Homme de le capturer, de l’expliciter et de le transmettre. 

Il est caché mais tellement abondant qu’on ne peut le compter quand il est sens ordinaire ou poisson ordinaire. Mais les gros poissons ont un nombre précis et ce nombre est 153. 
153 est le nombre qui est égal à 1+2+3+4+…+15+16+17. La somme des 17 premiers chiffres donne exactement 153, et c’est pourquoi 153 est appelé la gloire de 17. Il montre l’exaltation du 17, il en exprime toutes les possibilités. Or 17 est le nombre du sens de la révélation. Non plus les sens ordinaires, pour lesquels il faut déjà mettre en œuvre notre intelligence pour les mettre à jour, mais le sens du sens, le sens de l’Écriture elle-même.

C’est le sens des choses et des événements (les petits poissons innombrables) et le sens inspiré, le sens révélé, le sens immanent à la création. (153 gros poissons)
Simon, le pêcheur de poissons ordinaires est devenu, sous la conduite du Christ, Pierre, le chef des apôtres capable de mettre au jour, d’expliquer le sens révélé de l’Écriture. C’est ce que signifie sa pêche de 153 gros poissons et donc la mission que lui donne le Christ ressuscité.

L’âne

Entrée triomphale de Jésus à Jérusalem
Célébrée le dimanche des Rameaux

L’âne est un animal domestique, et l’homme utilise sa force non pas pour la guerre, ou pour tirer les chariots. L’âne est celui qui peut porter les plus lourdes charges et qui est assidu au travail pénible. Il reste indispensable dans les paysages escarpés ou tortueux, où l’automobile ne peut s’imposer.

Lorsque le peuple d’Israël a voulu qu’un roi lui soit désigné, Dieu fit désigner à Samuel Saül qui cherchait les ânesses perdues de son père (1 Sa 9, 15). De la lignée de David, Jésus pouvait prétendre au titre de roi d’Israël. Et s’il monte sur un ânon pour son entrée victorieuse à Jérusalem, c’est qu’il réalise la prophétie de Zacharie (Za 9, 9) et qu’il endosse réellement la royauté.

Le peuple l’acclamant lors de son entrée à Jérusalem criait des « Hosannah », originellement des « hoshiya na ! » qui signifient « Sauve-nous donc ! ». Ce salut, seul le roi est en capacité de le réaliser. Et c’est en tant que Fils de Dieu que Jésus ressuscité nous l’accorde (Ps 118, 25). 

Les rameaux que nos prêtres bénissent en ce jour de fête nous rappellent cette royauté du Christ, et nous en gardons ainsi une trace dans nos maisons.

Le cheval

Nous retrouvons les dons de la création, et nous retournons à notre étude des animaux de l’Écriture Sainte. Poursuivant les hébreux dans l’Exode (Ex 15, 21), appelés par les 4 Vivants dans l’Apocalypse (Ap 6), où monté par le Verbe de Dieu (Ap 19, 11), le cheval est cité plus de 150 fois dans la Bible.

Le cheval est un animal domestique au service de l’homme qui utilise sa force, pour débarder, tirer des chars ou des carrosses, mais surtout, avant les moteurs à explosion ou à réaction, la force du cheval était utilisée pour faire la guerre. C’est-à-dire que le cheval est utile pour obtenir ce qui s’obtient difficilement, ce qui suppose un combat pour être acquis.

En soi, le cheval est dénué de raison (Ps 32, 9) mais grâce au mors et à la bride, sa puissance est dirigée par l’homme et peut désigner une puissance rationnelle. C’est pourquoi le cheval, si souvent cité dans l’Écriture désigne la puissance irascible, la force à mettre en œuvre pour transformer le monde et pour nous transformer, nous engager dans le combat vers le bien.

Et c’est souvent un véritable combat de maintenir cette puissance obédientielle vers le Verbe. C’est pourquoi le Christ nous aide sans relâche. Relisons ce verset 11 de l’Apocalypse 19 « … et un cheval blanc apparut. Celui qui le monte s’appelle « fidèle » et « véritable » ; il juge et fait la guerre avec justice ». Remercions Dieu de cette assistance, sans laquelle il serait bien difficile de n’être pas désarçonné.

Les 4 Vivants – le Tétramorphe

Nous les avons étudiés chacun séparément, mais l’aigle, le lion, le taureau et la face d’homme sont toujours représentés ensemble, et nous nous devons de conclure notre étude en les observant non plus individuellement, mais en tant qu’« unité symbolique ».

Les 4 Vivants forment un tout, le « Tétramorphe ». Puissance régulatrice de production de la parole (lion), Désir du Père (taureau), Puissance de discrimination par l’intelligence contemplative (aigle) et Puissance d’exégèse et d’action de grâce (face d’homme).

Le Christ ressuscité est entouré de ces 4 symboles car ils montrent la puissance du Verbe incarné, vrai Homme et vrai Dieu. En tant qu’homme, Il nous montre l’homme pleinement réalisé dans sa relation à Dieu. Et en tant que Dieu, le principe de création et puissance de révélation. Nous n’oublions pas que dans l’Écriture Sainte, les animaux symbolisent toujours des aspects de la vie psychique de l’homme, et nous ajoutons ici que nous les voyons ailés, soulignant le côté spirituel.

Dans le mythe d’Œdipe, la mythologie nous raconte que le héros résout une énigme posée par une « sphinge » (féminin de sphinx), chimère monstrueuse qui dévore tous ceux qui ne donnent pas la bonne réponse. Et cette sphinge est précisément « composée » d’un corps de lion, des ailes d’aigle, et d’un buste et d’un visage de femme. Il manque le taureau, n’est-ce pas, et les autres sont en morceaux. Y aurait-il là quelque mystère à éclaircir ?

Enfin, chez Ezéchiel, les 4 Vivants forment comme un char de la divinité (Ez 1), et Saint Jean les décrit (Ap, 4, 7) appelant les 4 chevaux de l’Apocalypse (Ap 6, 1-8), voilà qui nous donne un indice sur le prochain animal que nous étudierons.

L’aigle

Dans la bible, les animaux sont très fortement présents, dès le serpent de la Genèse. Et comme toutes les images que l’Écriture contient, ils sont à interpréter symboliquement. Ainsi, les animaux nous montrent des capacités psychiques de l’homme. Aujourd’hui nous parlons de l’aigle.

En plus de sa grande beauté, l’aigle vole en planant très haut, toujours d’une façon majestueuse. Sa vue perçante lui permet de distinguer une souris à 1500m de hauteur. Voler si haut lui permet de voir d’un seul coup d’œil ce qu’un vol plus bas obligerait à voir partie par partie. Il voit donc l’« ensemble du paysage ». Et ses serres puissantes, saisissent avec précision et force ses proies.

C’est pourquoi l’aigle, si souvent cité dans l’Écriture (31 fois) désigne l’intelligence contemplative, « angélique », à laquelle nous pouvons participer par une élévation de notre regard, de notre écoute, à l’accueil de l’inspiration qui peut survenir à chaque instant, dans notre sommeil sous forme de songe, ou par vision dans la prière profonde de l’hésychasme, et qui nous permettent alors de saisir, de comprendre, les réalités spirituelles profondes, et leur beauté.  Ce n’est donc pas pour rien que l’évangéliste Saint Jean, dont l’enseignement nous amène à ces hauteurs, est apparenté à l’Aigle, parmi les quatre Vivants (Saint Marc le lionSaint Matthieu la face d’homme, et Saint Luc le taureau).

La face d’homme

Jusqu’ici, nous avons parlé d’animaux, et nous continuerons. Mais l’aigle, le lion et le taureau, comme nous l’avons observé sont parmi les 4 Vivants, qui, comme les évangélistes, entourent le Christ ressuscité. Nous finissons la série, en parlant de « la face d’homme ».

La face d’homme condense en elle toute notre identité et notre rapport au monde et aux autres, grâce aux cinq sens et à nos états d’âme qui s’y lisent aisément. Elle nous permet de communiquer, elle montre notre race, notre âge, notre humeur, notre rapport social. Elle est « pour l’autre » et nous ne voyons pas notre propre face, qui se tourne vers l’autre, vers notre altérité. De plus, elle condense en elle-même les trois autres vivants, l’aigle par les yeux, le lion par la gorge et la voix, et le taureau, car c’est par la face que le désir s’exprime.

Quelle est notre réelle altérité ? À quoi peut faire face la Face humaine, sinon au Dieu Créateur de toutes choses ? Et pourquoi faire sinon pour lui rendre grâce, par la Parole humaine qui fait connaître l’acte de reconnaissance. Action de grâce donc, mais exégèse aussi, car la face montre l’intérieur à l’extérieur. La Face humaine symbolise donc la puissance d’exégèse du Verbe et son action de grâce.

Nous comprenons que Le Christ, le Verbe incarné, s’est incarné pour ouvrir notre intelligence à la compréhension de la Vérité révélée (Luc 24, 45), nous a ouvert la voie de l’action de grâce parfaite (1 Co 11, 23-14).
L’évangéliste Saint Mathieu, est apparenté à la face d’homme.

Le taureau

Dans la bible, les animaux sont très fortement présents dès le serpent de la Genèse. Et comme toutes les images que l’Écriture contient, ils sont à interpréter symboliquement. Ainsi, les animaux nous montrent des capacités psychiques de l’homme. Aujourd’hui nous parlons du taureau.

Le taureau nous montre une violence sans discernement, ses cornes déchirent, éventrent, transpercent, et sa puissance d’insémination est sans limite. Châtré, le bœuf sert encore à inséminer… la terre, en tirant la charrue. Image de l’animalité pure et de la puissance non maîtrisée, il est à sacrifier, comme dans ce rituel pré-chrétien de la corrida, où l’homme apprend à dominer et transcender sa propre animalité, ou sur l’autel du temple de Jérusalem.

L’Aleph, 1ère lettre de l’alphabet hébreu et dont le hiéroglyphe antique est un taureau, nous montre le principe de création. Le taureau désigne le désir primordial de l’homme, antérieur à tous les autres, le désir de Dieu. Et il doit être châtré, pour qu’il n’engendre pas d’autres désirs qui nous en détourneraient. Il reste fécond pour inséminer notre Nature Humaine et servir sa transformation et sa réalisation.

Nous comprenons pourquoi un Taureau entoure le Christ, qui est le Fils et par Lui seul nous voyons le Père (Jn 14:9). Le Christ est le principe même de la création (Jn 1:3, Co 1:16), Il est pleinement le désir du Père, manifesté au Jourdain : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en Lui, je me suis désiré » (Matthieu 3:17)
L’évangéliste Saint Luc, est apparenté au Taureau.

Le lion

Dans la bible, les animaux sont très fortement présents dès le serpent de la Genèse. Et comme toutes les images que l’Écriture contient, ils sont à interpréter symboliquement. Ainsi, les animaux nous montrent des capacités psychiques de l’homme. Aujourd’hui nous parlons du lion.

Lent et noble, le « roi des animaux » montre une puissance calme, qui peut devenir imposante voire « dévorante ». Son rugissement résonne et terrifie sa proie à des lieues de distance. La loi du lion n’est pas discutée sous peine d’une punition définitive et mortelle. Il est celui qui régule les autres animaux, et ce qu’il symbolise doit donc réguler nos instances psychiques. (Régulus n’est-elle pas la principale étoile de la constellation du lion ?)

Le lion désigne la puissance de régulation de la raison dans les actes et l’assimilation des formes du monde. Mais cette assimilation doit être un éveil, une occasion de perfectionnement, et non une dévoration. L’oubli de Dieu transforme l’usage raisonné du monde en son exploitation insensée, la raison devient dévorante et tyrannique. Jésus est le « Lion de Juda » (Ap-5:5), mais le diable est un « lion rugissant, cherchant à dévorer » (1P-5:8)

Nous comprenons pourquoi dans le tétramorphe, les Quatre Vivants, un lion entoure le Christ. Il nous montre comment par la raison et l’intelligence, qui amènent à l’amour, Jésus nous enseigne à écouter, accueillir, et réguler. L’évangéliste Saint Marc, disciple de Simon-Pierre le chef des apôtres, est apparenté au Lion.

Tétramorphe – Porche de la cathédrale Saint Trophime à Arles